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7 décembre 2005
Une machinerie imposante
La journée s'est déroulée à une vitesse phénoménale, et je profite d'un instant de calme dans le QG, en début de soirée, pour écrire quelques impressions. Il faut dire que j'ai hier soir été promu chef des opérations d'information de la composante terrestre, ce qui certes entre dans mes compétences professionnelles, mais m'amène surtout à être l'un des éléments-clefs de l'état-major. Du coup, ma charge de travail est notablement augmentée, puisque je dois maintenant penser l'emploi de toutes les méthodes classiques des opérations d'information (effets physiques, guerre électronique, opérations des réseaux informatiques, opérations psychologiques et sécurité opérationnelle) ainsi que coordonner les éléments connexes et d'appui (renseignement, coopération civilo-militaire, conventions et droit, ainsi que l'information publique). Un défi guère pour me déplaire, bien entendu. Les opportunités ne manquent jamais de se présenter à moi ! :)
Ce d'autant que les opérations d'information jouent un rôle essentiel dans toute opération militaire de basse intensité. Le centre de gravité de la BFOR, la force multinationale dont nous représentons la composante terrestre, n'est en effet autre que le soutien de la population locale et la légitimité de notre présence sur le sol de la République de Bogaland. Et les médias du coin, 9 jours après le début de notre déploiement, commencent à prendre un ton critique et péjoratif à notre endroit. Autrement dit, c'est par l'influence des perceptions et la fédération des volontés que l'on parviendra à éviter une décrédibilisation complète et l'échec rapide de la mission. Toutes choses qui impliquent une focalisation coordonnée des effets projetés à l'intérieur comme à l'extérieur du théâtre d'opérations. Dissuader les ennemis (nous en avons, le scénario le dit), séduire les hésitants et encourager les amis : vaste programme !
Le rythme des activités est réglé par les rapports à fournir ou à recevoir, par les briefings à conduire ou à recevoir, ainsi que par les rotations internes aux cellules. En ce qui me concerne, je dois assister à plusieurs briefings et me tenir prêt à fournir des informations suivant l'évolution de la situation ou à contribuer aux travaux qui y sont effectués, notamment en matière de ciblage, de planification ou de reconnaissance ; je conduis également l'Information Operations Working Group, qui rassemble des représentants de tous les domaines de base d'état-major (toutes les cellules, quoi) ainsi que quelques spécialistes (officier d'information publique, officier de guerre électronique, officier conventions et droit) pour assurer la coordination des effets déployés contre des cibles désignées, et en premier lieu les acteurs susceptibles d'entraver la réussite de notre mission et d'empêcher la stabilisation de la région.
Demain, nous entamerons l'exercice avec une journée de répétition générale. Les premières heures seront immanquablement chaotiques et échevelées : lorsqu'un état-major de 120 officiers se met en place, avec la responsabilité d'une composante terrestre d'environ 15'000 soldats, le plus difficile consiste à faire en sorte que les multiples rouages le composant s'emboîtent les uns dans les autres et commencent à tourner dans la direction ordonnée. Une structure de ce type possède une telle complexité, avec toute la somme de compétences dispersées en son sein, qu'elle peut fort bien au pire aboutir à se neutraliser elle-même. Ce sont en général les connaissances générales, l'ouverture d'esprit, les contacts transversaux et surtout l'esprit de corps qui permettent de limiter les frictions et de faire fonctionner cette grande machinerie. Exactement les raisons pour lesquelles les officiers d'état-major général ont été nécessaires, à l'origine!
Publié par Ludovic Monnerat le 7 décembre 2005 à 21:24
Commentaires
Comme il n'y a pas de post de Ludovic en date du 8 décembre j'en déduis que les médias à la solde de l'adversaire ont sapé le soutien de la population. Le Bogaland s'est soulevé contre les 15 000 vaillants libérateurs de la BFOR, coupé les moyens de communication et l'électricité, et le chef des opérations d'information de la composante terrestre est, à l'heure où j'écris ces lignes, plongé dans le noir de son QG à apprendre le norvégien en attendant une intervention divine qui le sauverait de cette torture!
J'espère au moins qu'il reste des bières dans le frigo...
Santé Ludovic et à bientôt pour la suite de tes aventures "Viking"!
Publié par elf le 8 décembre 2005 à 19:34
Merci pour un tel souci, elf! :) Non, tout va bien, la journée était intense mais l'heure est désormais aux critiques internes (poétiquement nommées "hot wash up") pour cette répétition générale. Plusieurs incidents dans le théâtre d'opérations ne m'ont pas empêché de prendre un grand plaisir à assumer ma fonction... Davantage d'informations vont suivre ce soir !
Publié par Ludovic Monnerat le 8 décembre 2005 à 19:40