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8 décembre 2005

Un défi technologique

La grande répétition générale de la première journée de l'exercice s'achève à l'instant. Je n'ai pas vu le temps passer, entre les meetings, les briefings et autres événements aux mêmes consonances, et bien entendu mon bureau, sans lequel je ne sers effectivement pas à grand chose. Tout le monde tire un bilan positif de ces dernières heures, parce qu'elles ont surtout permis de prendre les contacts nécessaires avec les commandemements voisins et les unités subordonnées. La proximité due à l'exercice facilite notablement les choses : il suffit en effet de marcher quelque 20 mètres pour se rendre dans le QG de la composante navale, qui dans la réalité se trouverait en mer, à bord de l'USS Mount Whitney. Idem pour la composante aérienne, située dans le bâtiment voisin, et non dans une autre ville comme dans le scénario de l'exercice.

Cette centralisation est cependant une exception, et les différents participants sont au contraire répartis à l'échelle du continent. Cet après-midi, j'ai ainsi assisté à la première vidéoconférence entre le commandant de la composante terrestre et ses subordonnés directs ; soit la première brigade en Suisse (à Lucerne), la troisième brigade en Ukraine, la quatrième brigade en France, la cinquième brigade en Slovénie, le sixième bataillon en Irlande et le septième groupement de combat (de taille régimentaire) ailleurs en Suède. Les différents commandants pouvaient ainsi se voir et se parler, avec un son de grande qualité et une image assez saccadée, pour échanger leur opinion sur la situation et transmettre certaines demandes précises. Installer et entretenir un tel réseau de communications implique des efforts considérables.

Pour cet exercice, c'est un réseau gigantesque qui d'ailleurs a été mis sur pied. Chaque participant dispose en effet d'un accès personnel à un ensemble de répertoires virtuels dans lequel tous les documents sont disponibles. Il ainsi possible de regarder les documents établis ou obtenus par la cellule rens d'un quelconque commandement pour trouver les informations les plus fraîches. Et comme ce sont en tout quatre niveaux différents qui sont joués dans l'exercice (force de circonstance multinationale interforces, soit CJTF, composante de force, brigade et bataillon), le tout est d'une complexité majeure. Evidemment, le réseau a parfois du mal à répondre aux demandes de ses utilisateurs, même si ces derniers ont l'interdiction d'échanger des fichiers attachés sur l'e-mail interne dont ils disposent (mon adresse actuelle est ainsi [email protected] - il y a plus simple !).

Un tel système est cependant exactement celui qui serait employé lors d'une opération de maintien de la paix comparable dans ses dimensions et entreprise sous la bannière de l'OTAN. Même si la Suède est le pays organisateur et que la majorité des participants sont suédois, ce sont bien les ressources de l'Alliance - et notamment des Etats-Unis - qui ont été mises à contribution. Un point intéressant à relever est la répartition entre nations des personnages-clefs dans le commandement opérationnel de la composante : sur 14 officiers (avec le commandant) prenant part aux rapports tenus au plus haut échelon, on compte ainsi 8 Suédois, 3 Suisses, 1 Français, 1 Autrichien et 1 Américain. En d'autres termes, seuls deux membres de l'OTAN. Ce qui montre les possibilités offertes aux pays qui s'engagent dans le cadre du Partenariat pour la Paix créé voici plus de 10 ans.

Malgré cela, le défi technologique représenté par cet exercice exige une expérience et des moyens que seule possède l'Alliance en Europe.

Publié par Ludovic Monnerat le 8 décembre 2005 à 20:49

Commentaires

Bonsoir à vous.

Avez vous une idée du budget global alloué à cet exercice...Je pense qu'il doit être relativement important au regard des technologies et des moyens matériels et humains mis en oeuvre.

"La proximité due à l'exercice facilite notablement les choses..." Ce n'est que trop vrai. Cela induit il pour autant un "contact humain" qui n'existerait pas dans la réalité? Si oui, c'est peut être dommage car cela confère un sacré avantage dans ce type de mission. Il faudrait, je pense, veiller à séparer physiquement les espaces, même proches, pour ne permettre que des contacts virtuels ou radio téléphoniques, et non humains entre ces différentes composantes. Mais bon, c'est surement plus agréable et convivial ainsi.

Publié par Winkelried le 8 décembre 2005 à 21:38

Paradoxalement n'est-ce pas la connaissance d'humain à humain qui permet de connaître et d'anticiper son adversaire comme de faire confiance à son allié? N'est-ce pas la raison de ces grands rassemblements, travailler ensemble avec les mêmes objectifs pour d'une part apprendre à se connaître et si possible s'apprécier, et d'autre part prendre un "esprit de groupe" suivant la théorie sociale des groupes?
La socialisation lors de soirée est alors un plus.
A l'époque où il n'y avait que des hommes dans les corps d'armée, on appelait ça la fraternisation. A propos combien de femmes dans les 15'000 "hommes" ?(je ne parle pas de la chanteuse ;-)

Publié par elf le 9 décembre 2005 à 1:10

C'est vrai que les exercices de ce type permettent aux militaires de nations très différentes de se connaître ; cela en soi est un soutien à la paix. Cependant, comme la plupart des belligérants modernes ne sont pas des acteurs militaires classiques, l'influence à ce sujet est limitée. Nos camarades suédois sont absolument charmants, et cela fait toujours plaisir de venir dans leur pays, mais sur un théâtre d'opérations, les ennemis ne vont pas disparaître pour autant. Sinon, concernant le nombre de femmes, je dirais que l'on en compte une petite cinquantaine sur les 500 personnes mobilisées par l'exercice à Enköpping...

Publié par Ludovic Monnerat le 9 décembre 2005 à 15:23

"concernant le nombre de femmes, je dirais que l'on en compte une petite cinquantaine sur les 500 personnes mobilisées par l'exercice à Enköpping.."

ce qui fait 10% de l'effectif. C'est toujours plus que le faible pourcentage de militaires féminins de l'armée suisse (autour de 3-5%, il me semble - mais peut-être que je me trompe). De plus, je me permet d'imaginer que les participantes et participants à l'exercice en question sont majoritairement des officiers supérieurs, ce qui fait, finalement, une représentation féminine plutôt honorable.

A-t-on une idée du pourentage de femmes dans les armées étrangères participant à l'exercice, notamment dans l'armée suédoise qui a, comme la Suisse, un système de milice ?

Lorsque qu'une armée est constituée de professionnels, je comprends parfaitement que cela intéresse tant les femmes que les hommes en terme de carrières, d'expériences et de possibilités. Finalement, être militaire dans une structure professionnelle devient un métier comme un autre (avec ses spécialités, bien évidemment) et j'imagine parfaitement des femmes s'y intégrer (même si, le milieu militaire étant à ma connaissance assez machiste, cela ne doit pas être tous les jours facile pour elles). Je comprends que les femmes y soient moins nombreuses que les hommes étant donné les contraintes inérantes à ce type de métier.

Je suis néanmoins plus dubitatif quant à l'intégration féminine dans un système fondé sur le service militaire obligatoire pour les hommes comme c'est le cas chez nous. Leur volontarisme n'en fait forcément de meilleurs éléments que les hommes incoroprés avec elles et occupant les mêmes fonctions. De plus j'ai toujours de la peine à imaginer la cohabitation entre des militaires contraints d'effectuer leur service et des volontaires (qui plus est des femmes, dans un milieu qui leur est plutôt réticent)ayant fait personnellement la démarche de venir...

Même si personnellement j'ai pris la décision de ne plus questionner les militaires féminin sur leur motivations à intégrer l'armée(j'avais trop souvent l'impression d'entendre un discours tout cuit qui ne reflétait pas de vraies motivations), je continue de m'interroger sans trouver de réponse.

Bref. Je ne sais pas si j'ai été très clair, mais mes interrogations sont plus le fait d'un sentiment de malaise que fondée sur des faits tangibles (je n'ai jamais entendu une femme se plaindre de sa condition de militaire féminin, alors que pour les hommes j'ai des exemples à la pelle...). Pour faire court je comprend les motivation à intégrer un corps professionnel mais moins celle qui poussent à intégrer un système de milice contraignant pour la gent masculine.

Peut-être que je me fais des films...

(Histoire de ne pas me faire passer pour un horrible récalcitrant opposé à toute présence féminine dans l'armée, je fais mon mea-culpa. Oui c'est vrai, je n'ai jamais été très chaud; mais j'ai depuis eu l'occasion de servir avec des militaires féminin qui étaient extrêment sérieuses et très efficaces dans leurs fonctions respectives. Cela m'a fait renoncer à mon scepticisme et travailler avec ces femmes était plutôt enthousisamant alors que certains de leurs collègues masculins n'assuraient pas.)

Publié par Louis-Henri le 9 décembre 2005 à 18:54

L'armée de milice et les femmes

Il est vrai que les femmes conduisent, s'instruisent et visent mieux que les hommes en général. La technicité est leur alliée, là où la force physique leur ferait défaut en comparaison avec les hommes. Les femmes sont plus endurantes aussi et ont nettement moins tendance aux comportements à risque.

MAIS... elles ne savent pas vider une bouteille de Dôle assez vite et fumer des joints sans interruption pour être prises au sérieux par leurs collègues masculins.

Allez savoir pourquoi, mais si j'ai une bonne opinion de l'armée de milice en tant que telle j'ai une trés mauvaise opinion de ce à quoi les recrues y occupent leur temps...

Publié par elf le 9 décembre 2005 à 21:29

Quelques brèves précisions concernant les femmes. La plupart ici sont suédoises ; je n'ai noté aucun problème particulier de compétences les concernant. Elles sont ni meilleures, ni pires que les hommes ; et comme le niveau général des officiers d'état-major est élevé, le leur est en proportion. Maintenant, asses peu de femmes sont d'un grade très élevé. Les plus gradées sont majors ou plus rarement lieutenant-colonels, et la moyenne se situe plutôt du côté de capitaine. Parmi les 14 officiers-clefs de l'EM LCC, aucun n'est une femme ; on compte 1 major, 6 lieutenant-colonels, 6 colonels et 1 brigadier. Ce qui est un indicateur intéressant.

Publié par Ludovic Monnerat le 9 décembre 2005 à 21:36

"... j'ai une trés mauvaise opinion de ce à quoi les recrues y occupent leur temps..."

À la Légion, on occupait les temps morts à casser des cailloux pour faire des routes. C'est comme cela que les premières routes carrossables furent faites dans les Colonies...

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 11 décembre 2005 à 4:39

Alors comme cela manque de présence féminine par ici, je vais me permettre d'ajouter une pierre à à l'édifice (en tant que femme et que soldat).

"Même si personnellement j'ai pris la décision de ne plus questionner les militaires féminin sur leur motivations à intégrer l'armée(j'avais trop souvent l'impression d'entendre un discours tout cuit qui ne reflétait pas de vraies motivations), je continue de m'interroger sans trouver de réponse."

Et bien même si tu me poses pas la question, je vais y répondre quand même, à force j'ai l'habitude de me justifier.

Pour moi c'étais un défi, morale et physique, une curiosité (à force d'entendre parler les copains de l'armée et d'apercevoir la caserne de colombier pratiquement chaque jours), plus sérieusement un choix de formation dans le sens ou je n'avais pas envie de faire de longues études, mais j'avais envie de peut-être un jour faire dans l'humanitaire sans pouvoir me sacrifier comme le fait le personel de la croix rouge... Pour moi la seule réponse à mes envies c'étais les troupes de sauvetage... (explication pour faire court)

"je n'ai jamais entendu une femme se plaindre de sa condition de militaire féminin, alors que pour les hommes j'ai des exemples à la pelle...)"

Parceque simplement ont a pas le droit de se plaindre ! On est volontaire, on l'a choisi, alors on "subi"... Ou simplement que bizarrement les 6.5 envers des supérieur totalement misogyne se perde en route ?


"MAIS... elles ne savent pas vider une bouteille de Dôle assez vite et fumer des joints sans interruption pour être prises au sérieux par leurs collègues masculins."

Perso je suis pas une adepte de la Dôle, mais je suis capable de descendre autant de verre si ce n'est plus que mes camarades (ce qui à le dont de les étonnés), mais c'est un fait rare, car je suis responsable, et je n'imagine pas aller faire du NTTC avec la gueule de bois, c'est immature... Concernant les pétard, j'ai simplement passé l'âge je crois et pareil pour les effets secondaire. Et franchement je n'ai pas besoin de cela pour être prise au sérieux par mes camarades, il suffit de faire ses preuves, sans pour autant être collés aux basques des supérieurs à tout bout de champs, ne pas jouée aux allumeuses, ni au chieuse... Cela est largement suffisant....

Publié par Emma le 20 janvier 2006 à 18:58

Merci effectivement pour votre touche féminine bienvenue. Votre expérience au service militaire correspond à celle des militaires féminins que j'ai commandés pendant 4 mois, à l'été 2000, dans l'école de transmissions / renseignements de Fribourg. Personnellement, j'ai eu l'occasion d'apprécier l'effet d'une présence féminine pour la motivation des troupes masculines : rien de tel qu'une jeune femme accomplissant une marche d'endurance sans râler ou se plaindre pour rabattre le caquet de ces messieurs et les encourager à un peu plus d'entrain à la tâche ! :)

Publié par Ludovic Monnerat le 20 janvier 2006 à 19:34

"rien de tel qu'une jeune femme accomplissant une marche d'endurance sans râler ou se plaindre pour rabattre le caquet de ces messieurs et les encourager à un peu plus d'entrain à la tâche ! :) "

Vous avez bien de la chance... moi j'ai du porter leur sac et leur arme quand ça devenait trop lourd.
J'en ai vu exiger des traitements de faveur, j'ai vu des chefs y céder car ne voulant prendre aucun risque. J'ai même vu un camarade devoir "prêter" son duvet à une élève officier d'afrique, son binôme, le veinard! ;) , car elle n'avait pas pris le sien dans le but de s'alleger. Seulement voilà , l'hiver, il fait froid et mademoiselle, fille de diplomate se devait d'avoir les miches au chaud pendant les manoeuvres...Résultat, il récupéra son duvet quelque peu trempé dans la mesure où le froid avait été plus fort qu'une envie pressante et assez naturelle de sa "partenaire"...

Bref, ces exemples relèvent sans doute de la caricature et ne reflètent surement pas la réalité des femmes dans les armées...Néanmoins, je n'ai encore jamais rencontré "GI Jane".

Si ces dames ont désormais toute leur place dans les armées, ce n'est pas en tout cas, de mon point de vue, en unité de combat.

Publié par Winkelried le 20 janvier 2006 à 20:40

Il est claire que pour l'égo de ces messieurs, sa fait bobo lorsqu'une femme réussi mieux qu'eux... (en tir par exemple)(ce n'étais pas le cas pour les marches, mais j'ai toujours refusé de donner mon paquetage à un camarades, je n'ai jamais demandé à en être allégée. Je n'ai pas terminée toute les marches, car on ne pas laisser faire, pour ce qui est des courses d'armes, j'ai toujours été la dernières, mais je les ai toutes terminée et c'est une grande fierté)

Et bien GI Jane n'est pas forcément un bon exemple, c'est un cliché tout comme dans l'autre extrème des femmes qui se plaignent faibles et des femmes faciles et trop chaleureuse (on dira cela comme ça)... L'armée c'est comme au job, il y'a des bon et des moins bon, sauf qu'a l'armée il y'a moins de femmes, et qu'elle sont plus mis en évidence pour les pas de côté que pour les réussites...

Publié par Emma le 21 janvier 2006 à 1:15