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22 janvier 2005
Les héros de Sumatra
C'est le Blick qui l'écrit : les soldats suisses déployés en Indonésie sont des héros ! Evidemment, de telles effusions font toujours plaisir aux militaires, et le travail quotidien - 12 heures d'engagement pour les Super Puma - dans une chaleur étouffante mérite effectivement d'être signalé de façon positive. Cependant, porter aux nues un détachement qui fait avant tout son travail montre les excès, dans un sens comme dans l'autre, auxquels peuvent se livrer les médias. Les portraits des différents militaires engagés - ou des fonctionnaires du Département militarisés pour l'occasion... - permettent d'humaniser les missions de l'armée à l'étranger et favorisent l'identification à l'opération SUMA. En même temps, d'autres missions tout aussi difficiles passent complètement inaperçues, comme le travail des observateurs militaires dans des régions aussi peu hospitalières que le Congo ou la frontière israélo-libanaise...
On voit bien l'intérêt du Blick dans cette couverture : suivre l'élan de solidarité suscité par le tsunami - plus de 185 millions de francs récoltés par la Chaîne du Bonheur ! - et montrer l'engagement de l'armée d'une manière telle que le public en sera touché. En l'occurrence, l'intérêt de l'armée est parfaitement compatible, et les responsables de la communication de la Défense sont enchantés de tels articles. Il faut cependant imaginer ce qu'il se pourrait se passer si un incident grave survenait en cours d'opération : un militaire qui meurt de causes non naturelles, un accident qui cause des victimes dans la population civile, etc. Le registre de l'émotion est versatile et sans nuance. Comme toujours, seuls la vue d'ensemble et le contexte global donnent du sens à un événement particulier.
En tout cas, ces grands titres du Blick ("Die Schweiz ist stolz auf euch !") viennent vivement contredire Le Matin, dont le rédacteur en chef avait affirmé voici quelques jours "qu'envoyer quelques malheureux soldats non armés" pouvait "ficher par terre l'image du pays." Un commentaire acerbe et primesautier que son auteur doit certainement regretter...
Publié par Ludovic Monnerat le 22 janvier 2005 à 7:39