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16 janvier 2005
Asie : où est l'ONU ?
Trois semaines après le tsunami qui a ravagé l'Asie du Sud, qui assure la coordination de l'aide humanitaire et des moyens engagés dans le domaine du transport, du génie et de la logistique ? On se rappelle que l'ONU, par la voix de l'omniprésent Jan Egeland, avait émis la prétention exorbitante de diriger les opérations, avant de prendre conscience de la réalité et d'avoir une peine considérable à déployer des éléments au sol capable de jouer un rôle effectif. Habile à influencer les médias et obtenir des reportages favorables, l'ONU a ainsi été vilipendée et ridiculisée par des gens présents sur place.
Mais qu'en est-il aujourd'hui ? Il semblerait que l'ONU a consenti à diminuer ses prétentions et ne plus trop s'approprier les actions planifiées, préparées et exécutées par d'autres. Dans sa dernière conférence de presse, Jan Egeland a ainsi renoncé à ses rodomontades et montré la vraie dimension de l'engagement onusien :
The United Nations was now negotiating with governments for the use of 10 helicopters, which would slowly take over the work being done by the huge contingent of international military forces on the ground. Mr. Egeland commended the excellent relationship between relief organizations and those military assets in the region, and he had been pleased by reports that no government planned to pull out their assets until they could be assured there was no longer any need for them.
Finies les envolées lyriques sur le recours à des porte-hélicoptères : les Nations Unies ont enfin commencé à faire des demandes précises pour obtenir les moyens d'agir concrètement, et ont renoncé à faire pression sur les militaires américains et australiens pour qu'ils portent un drapeau bleu et se rangent sous le commandement de fonctionnaires cosmopolites. Le déploiement des 3 Super Puma suisses permet justement à l'ONU, par l'entremise du HCR, de commencer à mener de son propre chef des opérations aériennes qui restent indispensables dans la région. D'autres hélicoptères permettent à l'OMS de procéder à des évaluations précises de la situation sanitaire. La lente machinerie onusienne a démarré.
Pendant ce temps, les opérations militaires se poursuivent à un rythme constant. Le pont aérien mis en place par les Etats-Unis, Singapour ou encore l'Australie pour livrer des biens de première nécessité aux nombreux endroits inaccessibles continue de fonctionner à plein régime. Les navires déployés par la France et l'Allemagne sont arrivés sur zone. Pour sa part, l'Indonésie a renoncé à imposer une date limite pour la durée de ces opérations, reconnaissant aux Etats-Unis le rôle de "colonne vertébrale" pour toute l'aide humanitaire dans la province d'Aceh.
Le fonctionnement des principaux contingents militaires n'a pas changé : ce sont toujours les nations hôtes qui transmettent leurs besoins à la Combined Support Force 536, laquelle se charge de coordonner les actions en intégrant l'ONU à son fonctionnement, comme l'indique cette transcription :
Q Vicky O'Hara from National Public Radio. When you have a relief effort like this that involves assets from so many different countries, who coordinates the command and control component? Who plays traffic cop?
MR. FRY [de USAID, NDR] : That's -- I better take that one because that's one of the issues that -- one of the reasons I'm here.
There's a -- definitely within the military there's always the command-and-control element, but within the relief organizations and within any, in a sense, coalition partners or other countries that come to coordinate these relief efforts, I think that's the magic word, coordination. It's coordination, cooperation, consensus. There is no one in charge except for the host nation. They are in charge. They're ultimately responsible for this -- for coordinating -- I shouldn't say coordinating, but managing and telling us what to do and what their needs are, and if we can meet them we'll probably do that.
One of the unique things about CSF-536 is there's other representatives from at least five or six different nations' militaries as well as U.N. representatives, and we meet several times a day to coordinate our efforts with the understanding that we realize we have to work together to solve these problems and there is really no grand relationship other than coordination.
La réalité a donc fini par rattraper l'ONU. Il semble heureux qu'elle ait décidé de l'accepter et de mettre en sourdine son activisme pour s'occuper des populations dans le besoin.
COMPLEMENT I : Cet article fort intéressant d'un journal australien décrit la réaction des Etats-Unis et de l'Australie immédiatement après le tsunami, et comment le "groupe noyau" s'est formé. Une lecture hautement recommandée.
COMPLEMENT II : Décidément, il est difficile de trouver un impact positif de l'ONU dans la conduite des opérations ! Suite à la surcharge de l'aéroport de Banda Aceh, qui compte 200 mouvements par jour, les Forces armées indonésiennes ont décidé d'ouvrir un aérodrome militaire situé 20 km au nord, à Sabang, pour faciliter les choses. Pourtant, l'ONU a tenté de s'y opposer, et avoue maintenant le bienfondé de cette décision :
The opening of a military airport to relief planes on a small island off the northern tip of the devastated province of Aceh is easing the inflow of relief materials, a United Nations official said Monday.
"We were probably against the idea in the first instance," said Michael Huggins from the United Nations World Food Programme. "But it became obvious that the aid inflow was beyond the capabilities of the airports in Medan and Banda Aceh. It has taken a huge burden off the air shipments to Medan and Banda Aceh."
Une fois de plus, les capacités de l'ONU en matière de planification - notamment du transport aérien - sont vraiment lamentables. Ou faut-il comprendre que les fonctionnaires onusiens renâclaient à quitter leurs logements à Banda Aceh pour les baraquements spartiates d'un aérodrome militaire ? En tout cas, la plupart des vols de C-130 australiens se font désormais depuis Sabang.
Publié par Ludovic Monnerat le 16 janvier 2005 à 17:10